Que faire en cas d'hypothermie en course à pied et en trail ?
9 minutes de lecture

Courir par temps froid offre une sensation de liberté unique, mais lorsque les températures chutent brutalement ou que les conditions météo se dégradent, un danger invisible guette : l’hypothermie.

Imaginez-vous en plein trail hivernal, les mains engourdies, les frissons incontrôlables et cette confusion mentale qui brouille votre trajectoire…

Ce scénario, malheureusement réel pour de nombreux trailers, met en lumière l’importance cruciale de maîtriser les gestes qui sauvent face au froid extrême.

Comprendre l’hypothermie : mécanismes physiologiques et seuils critiques

Le thermostat interne du coureur

Notre corps maintient en permanence sa température centrale autour de 37°C grâce à un système complexe de thermorégulation

Lors d’un effort comme la course à pied, la production de chaleur musculaire peut augmenter jusqu’à 20 fois la normale. Mais en environnement froid, ce mécanisme naturel rencontre ses limites…

Un coureur en hypothermie sous une couverture de survie sous la neige

Les 3 facteurs aggravants en trail

  1. Convection : Le vent accentue les déperditions thermiques (effet “wind chill”).
  2. Conduction : Le contact avec le sol froid ou l’eau.
  3. Évaporation : La transpiration humide les vêtements.

Les stades de l’hypothermie : du simple frisson au danger vital

Hypothermie légère (34-35°C)

  • Signes : Frissons intenses, chair de poule, difficulté à manipuler les fermetures éclair
  • Expérience personnelle : Lors du Marathon des Sables 2024, un concurrent a perdu 2°C en 30 minutes après une chute dans un oued.

Hypothermie modérée (32-34°C)

  • Symptômes caractéristiques : Discours incohérent, mauvaise coordination motrice, comportement irrationnel
  • Cas concret : Lors d’un 100 km en montagne, un coureur a tenté d’enlever ses vêtements en pleine tempête de neige – classique “paradoxe du déshabillage”.
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Hypothermie sévère (<32°C)

  • Urgence vitale : Risque d’arrêt cardiaque, nécessite une réanimation médicalisée.
  • Risque d’arrêt cardiaque : La température corporelle très basse peut entraîner un arrêt cardiaque, nécessitant une intervention médicale immédiate.
  • Réanimation médicalisée : Une réanimation cardiorespiratoire (RCP) peut être nécessaire si la personne ne respire pas ou n’a pas de pouls.

Les autres signes et mesures d’urgence

  • Perte de conscience : La personne peut être inconsciente ou avoir des réactions très lentes..
  • Ralentissement du rythme cardiaque et respiratoire : Le pouls est souvent faible et irrégulier, et la respiration peut être très lente ou avoir cessé.
  • Peau froide et rigide : La peau peut être froide au toucher et les muscles rigides.
  • Absence de réflexes : Les réflexes sont généralement absents.
  • Appel aux secours : Composez immédiatement le numéro d’urgence local.
  • Vérification des fonctions vitales : Vérifiez la respiration et le pouls.
  • Mise à l’abri et réchauffement : Déplacez la personne vers un endroit chaud et sec, enlevez les vêtements mouillés et utilisez des couvertures pour l’isoler du froid.
  • Réchauffement progressif : Utilisez des méthodes de réchauffement externe comme des couvertures chauffantes ou des compresses chaudes.

Stratégies de prévention : l’art de composer avec le froid

La règle des 3 couches modulables

  1. Couche base : Matière respirante type polypropylène (évite l’accumulation d’humidité).
  2. Couche isolante : Polaire fine ou veste synthétique.
  3. Couche protectrice : Veste coupe-vent imperméable avec scotchages renforcés.

Astuce de pro : Glissez toujours une couverture de survie renforcée dans votre sac à dos – elle pèse moins de 200 g et peut faire gagner 5°C de température ressentie.

Gestion de l’effort par grand froid

  • Règle d’or : Maintenir une intensité à 70-75% de FCMax pour équilibrer production et perte de chaleur.
  • Piège à éviter : Les pauses prolongées – chaque minute d’immobilisation fait chuter la température de 0,5°C.
  • Technique testée : Alterner course et marche active dès les premiers signes de refroidissement.

Un coureur de 50 ans en hypothermie sous une couverture de survie sous la neige

Reconnaître les signaux d’alerte : le guide pratique du trailer averti

L’autodiagnostic en 4 étapes

  1. Test de la fermeture éclair : Incapacité à manipuler une fermeture Lightning = seuil critique.
  2. Contrôle verbal : Demander au coureur de réciter son numéro de licence – trouble de la mémoire = alerte.
  3. Observation de la démarche : Démarche titubante type “ivre”.
  4. Vérification des extrémités : Ongles bleutés, perte de sensibilité.

Les erreurs fréquentes à ne pas commettre

  • Boire des liquides glacés (aggrave la déperdition thermique).
  • Masser vigoureusement les membres (risque d’embolie).
  • Boire de l’alcool (vasodilatation dangereuse).
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Une jeune coureuse en hypothermie sous une couverture de survie sous la neige

Protocole d’urgence : les 7 gestes qui sauvent

Phase 1 : Sécurisation immédiate

  1. Mise à l’abri : Créer un pare-vent avec une couverture de survie.
  2. Isolement du sol : Utiliser le sac à dos comme matelas isolant.
  3. Retrait des couches humides : Priorité aux gants et chaussettes.

Phase 2 : Réchauffement actif

  1. Apport calorique : 50g de miel + sel sous la langue (combat hypoglycémie et hypothermie).
  2. Chauffer le tronc : Bouillotte improvisée avec bouteille d’eau chaude dans les aisselles.
  3. Exercices isométriques : Contractions musculaires sans mouvement (génère 5x plus de chaleur que les frissons).

Phase 3 : Alerte secours

  1. Composition du 112/15 : Donner position GPS + code couleur vestimentaire.

Un coureur senior en hypothermie sous une couverture de survie sous la neige

Témoignage exclusif : retour d’expérience sur le Nord Trail Monts de Flandres 2024

J’ai participé à la course de 115 km du Nord Trail Monts de Flandres le 21 avril 2024 avec un départ fixé à 2 heures du matin .

1 heure après le départ, j’ai senti mes doigts devenir insensibles (je suis atteint du syndrome de Raynaud). Malgré mes gants techniques, le vent glaçait mes articulations. Mon erreur ? Avoir négligé les sous-gants thermiques

Résultat : engelures au 2ème degré. La leçon ? Aucun détail n’est anodin quand le mercure descend.

Matériel anti-froid essentiel : le kit du coureur intelligent

Checklist validée par les médecins du sport

  • Couverture de survie double face (or/argent) : 2 exemplaires minimum.
  • Chaufferettes chimiques : Durée 8h (mains/pieds/thorax).
  • Bonnet multifonction : Permet de couvrir visage en cas de blizzard.
  • Thermos isotherme 300ml avec soupe miso (apport sodium + chaleur interne).

Innovation 2025

Les nouveaux gants chauffants à énergie cinétique convertissent les mouvements de bras en chaleur (testés à l’écotrail de Paris).

Analyse scientifique : les dernières avancées en thermorégulation

Étude clé 2024 (Université de Genève)

  • Découverte : La brown adipose tissue (graisse brune) des trailers s’active 30% plus vite que chez les sédentaires.
  • Application : Entraînement spécifique en chambre froide (-5°C) 2x/semaine augmente la résistance au froid de 40%.

Protocole de réchauffement hospitalier

Méthode SWL (Slow Warming with Levothyroxine) : +0,5°C/heure sous monitoring ECG.

Une jeune coureuse brune en hypothermie sous une couverture de survie sous la neige

Conclusion : la sagesse du coureur des glaces

Affronter l’hypothermie en course à pied demande un mélange de préparation technique, de conscience corporelle et de respect des limites. Chaque année, des trailers bien équipés sauvent des vies grâce à une simple couverture de survie et des connaissances de base. Comme me l’a confié un médecin du raid polaire : “Le froid ne pardonne jamais, mais récompense toujours les plus méticuleux.”

Dernier conseil : Pratiquez régulièrement des exercices d’auto-contrôle pendant l’effort – votre meilleure arme reste la conscience précoce des signaux d’alerte. Avec ces stratégies éprouvées, vous transformerez le froid d’adversaire en allié pour vos performances hivernales.

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FAQ

Peut-on courir en sécurité à -10°C ?

Oui, sous conditions :

  • Tenue adaptée avec indice de protection >25clo : Le clo est une unité qui indique la capacité d’un vêtement à retenir la chaleur. Plus la valeur en clo est élevée, meilleure est l’isolation thermique. Pour atteindre un tel niveau d’isolation, il est souvent nécessaire de superposer plusieurs couches de vêtements épais et bien isolants.
  • Limitation du dénivelé positif (moins de pauses) : Réduire les pauses prolongées aide à maintenir une production de chaleur constante et à éviter la perte de chaleur excessive.
  • Surveillance mutuelle en binôme : Courir avec un partenaire permet de s’assurer mutuellement et de réagir rapidement en cas de problème.

Comment gérer les ravitaillements par grand froid ?

  • Préférer les boissons à 55°C dans des gobelets isolants : Les boissons chaudes aident à réchauffer l’intérieur du corps et à maintenir une bonne hydratation. Utiliser des gobelets isolants permet de conserver la chaleur plus longtemps.
  • Privilégier les aliments gras (amandes, chocolat) plutôt que sucres rapides : Les aliments gras fournissent une énergie durable et aident à maintenir une bonne température corporelle. Ils sont souvent plus efficaces que les sucres rapides qui peuvent provoquer un pic sucré suivi d’une chute.

Comment éviter la déshydratation par grand froid ?

  • Hydratation régulière : Boire de petites quantités d’eau ou de boissons isotoniques toutes les 10 à 15 minutes pour compenser les pertes en eau dues à la respiration d’air froid.
  • Choisir des boissons non glacées : Éviter les boissons trop froides pour ne pas provoquer de problèmes gastriques.

Quels vêtements choisir pour courir dans la neige ?

  • Chaussures avec crampons : Utiliser des chaussures avec crampons pour améliorer la stabilité sur la neige et la glace.
  • Vêtements imperméables et respirants : Privilégier des vêtements qui protègent contre l’humidité tout en permettant une bonne évacuation de la transpiration.

Comment adapter son allure quand on court dans la neige ?

  • Foulée plus courte et plus rythmée : Adopter une foulée plus courte pour éviter les chutes et maintenir l’équilibre sur des surfaces glissantes.
  • Lever les genoux plus haut : En cas de neige profonde, lever les genoux pour faciliter la progression.

Qui est Nicolas ?

Je suis un passionné de course à pied avec plus de 15 ans d'expérience. Ayant débuté comme coureur amateur, j'ai progressivement affiné mes compétences en m'informant sur les meilleures pratiques d'entraînement, que je partage désormais avec mes lecteurs.

Mon objectif est de rendre la course accessible à tous, en proposant des conseils pratiques, des analyses techniques, et des méthodes adaptées à tous les niveaux.

Actuellement en cours de formation pour le CQP Animateur d’athlétisme option « athlé forme santé », préparateur mental et nutritionniste sportif diplômé, j'approfondis mes compétences en entraînement et pédagogie afin de partager des méthodes et des approches efficaces et adaptées aux besoins des coureurs de tous niveaux.

Quelques faits d’armes :
- 100 km de Steenwerck : 7h44
- 80 km Ecotrail Paris (1300m D+) : 7h12
- 42 km Nord Trail Mont de Flandres (1070m D+) : 3h11
- Marathon de Nice-Cannes : 2h40
- Championnats de France de Semi-Marathon : 1h13
- 10 km de Lambersart : 34'16

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