Une question qui revient souvent, tant chez les coureurs amateurs que chez les professionnels, est celle du temps passé en l’air par rapport au temps de contact au sol pendant la course. Dans cet article, nous allons explorer en détail cette fascinante question et ses implications pour les performances athlétiques.
La mécanique de base de la course
Avant de plonger dans les détails, il est essentiel de comprendre les principes fondamentaux de la biomécanique de la course. Lorsqu’un athlète court, son mouvement peut être divisé en deux phases principales :
- La phase de contact : lorsque le pied touche le sol.
- La phase de vol ou suspension : lorsque les deux pieds sont en l’air.
Ces deux phases alternent continuellement pendant la course, créant un cycle répétitif qui propulse l’athlète vers l’avant.
Le temps de contact au sol vs le temps en suspension
Contrairement à ce que l’on pourrait intuitivement penser, les recherches montrent que les coureurs passent en réalité plus de temps en contact avec le sol qu’en l’air. Cette découverte peut sembler surprenante, mais elle est soutenue par de nombreuses études scientifiques utilisant des technologies de pointe pour mesurer avec précision les mouvements des athlètes.
Les chiffres clés
Voici quelques données importantes à retenir :
- En moyenne, les coureurs passent environ 60% du temps de leur foulée en contact avec le sol.
- Le temps restant, soit environ 40%, est passé en phase de vol.
- Ces pourcentages peuvent varier légèrement en fonction de plusieurs facteurs que nous explorerons plus loin.
Facteurs influençant le ratio temps de contact/temps de vol
Plusieurs éléments peuvent affecter la proportion de temps qu’un athlète passe au sol par rapport à l’air :
La vitesse de course
La vitesse est l’un des facteurs les plus importants. En général :
- À des vitesses plus élevées, le temps de contact au sol diminue, tandis que le temps de vol augmente.
- À des vitesses plus basses, c’est l’inverse qui se produit.
Cependant, même aux vitesses de sprint les plus élevées, le temps de contact au sol reste généralement supérieur au temps de vol.
La technique de course
La technique individuelle de chaque coureur peut grandement influencer ce ratio. Par exemple :
- Les coureurs qui atterrissent sur l’avant-pied ont tendance à avoir des temps de contact plus courts.
- Ceux qui atterrissent sur le talon passent généralement plus de temps au sol.
La surface de course
Le type de terrain sur lequel l’athlète court peut également jouer un rôle :
- Les surfaces dures comme l’asphalte favorisent des temps de contact plus courts.
- Les surfaces molles comme le sable ou l’herbe augmentent généralement le temps de contact.
La morphologie de l’athlète
Les caractéristiques physiques du coureur, telles que :
- La longueur des jambes.
- La masse musculaire.
- La flexibilité.
Tous ces éléments peuvent influencer la mécanique de course et, par conséquent, le ratio temps de contact/temps de vol.
L’importance du temps de contact au sol
Bien que l’idée de « flotter » plus longtemps dans les airs puisse sembler attrayante, le temps de contact au sol est en réalité crucial pour la performance. C’est pendant cette phase que l’athlète :
- Génère la force nécessaire pour se propulser vers l’avant.
- Absorbe l’impact de l’atterrissage.
- Prépare la prochaine foulée.
Une gestion efficace du temps de contact est donc essentielle pour optimiser la vitesse et l’efficacité de la course.
Les implications pour l’entraînement
Comprendre cette réalité biomécanique a des implications importantes pour l’entraînement des coureurs :
Travail de la force
Le développement de la force explosive des jambes peut aider à réduire le temps de contact tout en maintenant ou augmentant la force produite.
Exercices de pliométrie
Les exercices de pliométrie, qui impliquent des sauts et des rebonds rapides, peuvent améliorer la réactivité au sol et potentiellement réduire le temps de contact.
Technique de course
Un travail spécifique sur la technique de course, notamment sur la pose du pied et la position du corps, peut optimiser le ratio temps de contact/temps de vol.
Entraînement à la vitesse
Des séances d’entraînement à haute intensité peuvent aider les coureurs à s’habituer à des temps de contact plus courts tout en maintenant une propulsion efficace.
Les différences entre les disciplines
Il est important de noter que le ratio temps de contact/temps de vol peut varier considérablement selon la discipline athlétique :
Sprint
Les sprinters ont généralement les temps de contact les plus courts, mais même eux passent plus de temps au sol qu’en l’air. Leur technique vise à maximiser la force produite pendant un temps de contact minimal.
Course de fond
Les coureurs de fond ont tendance à avoir des temps de contact plus longs. Cela leur permet de conserver de l’énergie sur de longues distances et de maintenir un rythme constant.
Course d’obstacles
Dans les courses d’obstacles (type Spartan Race), le ratio peut varier considérablement en fonction de l’obstacle. Les athlètes alternent entre des phases de course normale et des sauts ou franchissements qui augmentent le temps de vol.
Les technologies de mesure
Pour étudier précisément ces phénomènes, les chercheurs et entraîneurs utilisent diverses technologies avancées :
Plateformes de force
Ces dispositifs mesurent avec une grande précision les forces exercées par le pied sur le sol, permettant de calculer exactement le temps de contact.
Systèmes de capture de mouvement
Des caméras haute vitesse combinées à des marqueurs réfléchissants placés sur le corps de l’athlète permettent une analyse détaillée de chaque phase de la foulée.
Accéléromètres et gyroscopes
Ces capteurs, souvent intégrés dans des chaussures ou des vêtements intelligents, peuvent fournir des données en temps réel sur les mouvements de l’athlète.
Tapis de course instrumentés
Ces tapis spéciaux intègrent des capteurs qui mesurent chaque contact du pied, offrant une analyse continue sur de longues distances.
Les mythes et idées reçues
Il existe de nombreux mythes autour de la course et du temps passé en l’air. Voici quelques-uns des plus courants que nous pouvons maintenant démystifier :
Mythe 1 : « Les meilleurs coureurs volent »
Bien que les coureurs d’élite puissent sembler « voler », ils passent en réalité la majorité de leur temps en contact avec le sol. Leur efficacité vient de la puissance qu’ils génèrent pendant ce contact.
Mythe 2 : « Plus on passe de temps en l’air, plus on est rapide »
Un temps de vol plus long n’est pas nécessairement synonyme de vitesse accrue. C’est l’équilibre entre le temps de contact et le temps de vol qui détermine l’efficacité de la course.
Mythe 3 : « Le temps de contact doit être le plus court possible »
Bien qu’un temps de contact court puisse être bénéfique dans certaines situations (comme le sprint), un temps de contact trop court peut en réalité réduire la force produite et donc la vitesse globale.
L’évolution de notre compréhension de la biomécanique de course
Notre compréhension de la biomécanique de la course a considérablement évolué au fil des années, grâce aux avancées technologiques et à des recherches approfondies. Voici quelques étapes clés :
Les années 1960-1970
Les premières études sérieuses sur la biomécanique de la course commencent à émerger. Les chercheurs utilisent des caméras à haute vitesse pour analyser les mouvements des athlètes.
Les années 1980-1990
L’introduction de plateformes de force et de systèmes de capture de mouvement plus sophistiqués permet une analyse plus précise du temps de contact et du temps de vol.
Les années 2000 à aujourd’hui
L’avènement des capteurs portables et de l’intelligence artificielle révolutionne notre capacité à collecter et analyser des données en temps réel, ouvrant de nouvelles perspectives pour l’optimisation des performances.
Les implications pour la santé
Comprendre le ratio temps de contact/temps de vol n’est pas seulement important pour la performance, mais aussi pour la santé des coureurs :
Prévention des blessures
Un temps de contact trop court peut augmenter le stress sur les articulations et les muscles, augmentant le risque de blessures. À l’inverse, un temps de contact trop long peut indiquer un manque d’efficacité et potentiellement surcharger certains groupes musculaires.
Réhabilitation
Lors de la récupération après une blessure, surveiller et ajuster progressivement le ratio temps de contact/temps de vol peut aider à une reprise en douceur de l’activité.
Efficacité énergétique
Optimiser ce ratio peut aider les coureurs à améliorer leur efficacité énergétique, ce qui est particulièrement important pour les courses de longue distance et peut avoir des effets positifs sur la santé cardiovasculaire à long terme.
Perspectives futures
La recherche dans ce domaine continue d’évoluer rapidement. Voici quelques directions prometteuses pour l’avenir :
Personnalisation de l’entraînement
Avec l’amélioration des technologies de mesure, nous pourrions voir des programmes d’entraînement ultra-personnalisés basés sur le profil biomécanique unique de chaque athlète.
Intelligence artificielle
L’IA pourrait bientôt être capable d’analyser en temps réel la technique de course et de fournir des feedbacks instantanés pour optimiser le ratio temps de contact/temps de vol.
Nouvelles technologies de chaussures
Les innovations dans la conception des chaussures de course pourraient viser à optimiser spécifiquement ce ratio pour différents types de coureurs et de courses.
Ce qu’il faut retenir
En conclusion, contrairement à ce que l’on pourrait penser intuitivement, les athlètes passent effectivement plus de temps en contact avec le sol qu’en suspension lorsqu’ils courent. Ce fait, loin d’être un inconvénient, est en réalité crucial pour la performance athlétique.Le temps de contact au sol est le moment où l’athlète génère la force nécessaire pour se propulser vers l’avant. C’est pendant cette phase que la magie opère : les muscles se contractent, l’énergie est transférée au sol, et le coureur se prépare pour la prochaine foulée.Comprendre et optimiser le ratio entre le temps de contact et le temps de vol est donc essentiel pour améliorer les performances en course. Cela implique un travail sur la technique, la force, la flexibilité et bien d’autres aspects de l’entraînement.Pour les entraîneurs et les athlètes, cette connaissance ouvre de nouvelles perspectives pour affiner les méthodes d’entraînement. Pour les chercheurs, cela soulève de nouvelles questions passionnantes sur la biomécanique humaine et les limites de la performance athlétique. Alors, la prochaine fois que vous regarderez un athlète courir, rappelez-vous que même s’il semble voler, c’est son interaction avec le sol qui est le véritable moteur de sa vitesse. C’est un rappel fascinant de la complexité et de la beauté de la mécanique du corps humain en mouvement.
Qui est Nicolas ?
Je suis un passionné de course à pied avec plus de 15 ans d'expérience. Ayant débuté comme coureur amateur, j'ai progressivement affiné mes compétences en m'informant sur les meilleures pratiques d'entraînement, que je partage désormais avec mes lecteurs.
Mon objectif est de rendre la course accessible à tous, en proposant des conseils pratiques, des analyses techniques, et des méthodes adaptées à tous les niveaux.
Actuellement en cours de formation pour le DEJEPS (Diplôme d'État de la Jeunesse, de l'Éducation Populaire et du Sport) spécialité Athlétisme, j'approfondis mes compétences en entraînement et pédagogie afin de partager des méthodes et des approches efficaces et adaptées aux besoins des coureurs de tous niveaux.
Quelques faits d’armes :
- 100 km de Steenwerck : 7h44
- 80 km Ecotrail Paris (1300m D+) : 7h12
- 42 km Nord Trail Mont de Flandres (1070m D+) : 3h11
- Marathon de Nice-Cannes : 2h40
- Championnats de France de Semi-Marathon : 1h13
- 10 km de Lambersart : 34’16