
Les marathoniens élite se posent constamment la même question : combien de glucides faut-il consommer pendant une course pour optimiser la performance ?
Une nouvelle étude scientifique récente apporte des réponses précises en testant les stratégies nutritionnelles qui promettent d’améliorer la capacité d’oxydation des glucides chez les coureurs de haut niveau.
Découvrez comment 120 grammes de glucides par heure transforme l’économie de course, mais attention : le prix à payer en termes de troubles gastro-intestinaux est bien réel.
La Nouvelle Étude : Testez Trois Niveaux d’Apport Glucidique
Une recherche scientifique révolutionnaire a mis à l’épreuve 8 marathoniens élite (âge moyen 29 ans, VO₂max de 70,6 mL/kg/min, meilleur temps moyen en marathon 2h22:54) dans des conditions contrôlées sur un tapis roulant. Chaque athlète a complété trois séances de 2 heures différentes, chacune avec une stratégie de ravitaillement distinct :
- 60 grammes de glucides par heure (maltodextrine seule)
- 90 grammes de glucides par heure (mélange maltodextrine:fructose 2:1)
- 120 grammes de glucides par heure (mélange maltodextrine:fructose 1:1)
Protocole Scientifique : Une Méthodologie Rigoureuse
Pour assurer l’exactitude des résultats, les chercheurs ont suivi un protocole très précis. Avant chaque essai, les coureurs ont consommé une diète hyperglucidique (8 g/kg/jour) et un petit-déjeuner présenté à base de 2 g/kg de glucides.
Pendant les séances, des boissons énergétiques ont été distribuées toutes les 15 minutes, contenant des glucides marqués isotopiquement (avec un marqueur spécial). Cette technique a permis aux chercheurs de mesurer directement la quantité exacte de glucides exogènes brûlés lors de l’effort.
alt="Graphique étude physiologique appliquée, décembre 2025 - Recherche portant sur l'oxydation des glucides exogènes et l'économie de course chez les marathoniens élite" class="wp-image-53990">Le protocole d’effort s’est déroulé ainsi :
- 15 minutes à 95% du seuil lactique
- 90 minutes à 94% du seuil aérobie (proche de l’allure marathon)
- 15 minutes finales à 95% du seuil lactique
Les chercheurs ont mesuré avec précision :
- L’oxydation totale des glucides
- L’oxydation des glucides exogènes (provenant du ravitaillement)
- L’oxydation des lipides
- L’économie de course (VO₂ relatif)
- Les symptômes gastro-intestinaux rapportés par les coureurs
Résultats Majeurs : Plus de Glucides = Plus d’Efficacité, mais Plus de Malaise
Les résultats scientifiques révèlent une tendance très claire : plus les athlètes consomment de glucides, plus ils en oxydent (brûlent). Cependant, ce bénéfice s’accompagne d’un coût gastrique important.
L’Oxydation des Glucides Exogènes Bondit à 120g/h
L’oxydation des glucides exogènes (les glucides provenant uniquement de votre ravitaillement, pas de vos réserves internes) a progressé de manière spectaculaire :
- 60 g/h : 0,89 g/min d’oxydation exogène
- 90 g/h : 1,31 g/min d’oxydation exogène
- 120 g/h : 1,68 g/min d’oxydation exogène (pic observé : 1,77 g/min)
Cette augmentation de 89% entre 60 et 120 grammes par heure signifie que les coureurs élites peuvent effectivement utiliser beaucoup plus de glucides exogènes lorsqu’ils augmentent leur apport nutritionnel pendant la course.
L’Oxydation Totale des Glucides S’Intensifie
L’oxydation totale des glucides (incluant les réserves internes de glycogène) montre également une progression significative :
- 60 g/h : 2,08 g/min
- 90 g/h : 2,46 g/min
- 120 g/h : 3,06 g/min
Cette augmentation de 47% démontre que le métabolisme énergétique se réoriente vers l’utilisation de glucides lorsque l’apport augmente, préservant potentiellement les réserves de graisse pour plus tard.
L’Économie de Course S’Améliore de 2,6%
L’un des résultats les plus intéressants concerne l’économie de course (l’efficacité énergétique). Chez les marathoniens consommant 120 g/h, le coût en oxygène diminue de 2,6% comparé à ceux consommant 60 g/h.
Bien que 2,6% puisse sembler minimal, sur un marathon de 2h20, cela représente une économie d’effort significative qui peut faire la différence dans les derniers kilomètres ou permettre de soutenir une allure légèrement supérieure avec un effort équivalent.
Le Revers de la Médaille : Troubles Gastro-Intestinaux Importants
Cependant, tous les coureurs ont rapporté au moins un symptôme modéré ou sévère de malaise gastro-intestinal à chaque niveau d’apport. Les problèmes gastriques ont été particulièrement intenses à 120 g/h.
Les symptômes prédominants incluaient :
- Nausées
- Ballonnements
- Sensation de plénitude gastrique
Ces troubles digestifs représentent un problème majeur car ils peuvent conduire à une réduction de l’absorption nutritionnelle ou à l’abandon du plan de ravitaillement, annulant ainsi les bénéfices de performance.
Comprendre le Mécanisme : Transporteurs de Glucose Saturés
Pourquoi ces troubles gastro-intestinaux surviennent-ils ? La réponse réside dans la physiologie intestinale. L’absorption des glucides dépend de transporteurs intestinaux spécifiques :
- SGLT1 (pour le glucose et la maltodextrine)
- GLUT5 (pour le fructose)
Quand l’apport en glucose seul dépasse environ 60 grammes par heure (1 g/min), SGLT1 sature. Les glucides non absorbés restent alors dans l’intestin, où ils :
- Attirent de l’eau (effet osmotique)
- Causent des ballonnements et des douleurs
- Peuvent provoquer des diarrhées
En combinant glucose et fructose (avec un ratio 1:1 à 120 g/h), on peut légèrement augmenter l’absorption globale, mais on ne peut pas l’éliminer complètement la saturation.
Implications Pratiques pour les Marathoniens
Pour les Coureurs Élites
Si vous êtes un coureur élite avec une capacité d’absorption digestive entraînée et un VO₂max élevé, les données suggèrent que l’objectif de 90 à 120 grammes de glucides par heure peut être bénéfique pour la performance. Cependant, il faut s’y entraîner progressivement pendant vos longs entraînements.
Pour la Majorité des Marathoniens
Pour la majorité des coureurs récréatifs et semi-compétitifs, un apport de 70 à 90 grammes de glucides par heure représente le meilleur équilibre entre :
- Amélioration de la performance
- Tolérance digestive acceptable
- Faisabilité logistique (nombre de gels ou boissons à transporter/consommer)
Stratégie Nutritionnelle Optimale : Progressivité et Adaptabilité
L’étude renforce une conviction clé en nutrition sportive : le meilleur plan de nutrition n’est pas celui qu’on lit en ligne, mais celui qu’on a testé pendant l’entraînement.
Phase 1 : Sorties Longues à l’entraînement
Commencez avec un apport modéré de 60 grammes par heure pendant vos longues sorties (15 à 20 km). Notez vos sensations digestives et votre niveau d’énergie.
Phase 2 : Augmentation Progressive
Augmentez graduellement à 75-90 grammes par heure sur vos prochains efforts longs, en variant les sources de glucides (boissons, gels, barres).
Phase 3 : Test en Conditions de Course
Environ 3 à 4 semaines avant votre marathon, testez votre stratégie définitive (60, 90, ou 120 g/h) sur un entraînement long dans des conditions similaires à celles du jour de la course (heure de la journée, température, vêtements).
Phase 4 : Adaptation le Jour J
Si vous avez du mal avec votre plan nutritionnel le jour J, ne déviez pas radicalement. Réduisez légèrement votre apport plutôt que de l’augmenter, ou changez la texture (passage de gels à une boisson) pour améliorer la tolérance digestive.
Intégration du Ravitaillement : Timing et Format
Pour atteindre votre objectif horaire de glucides, vous avez plusieurs options :
Pour 60 g/h :
- 1 gel énergétique (25-30g) + 1 boisson isotonique (30-35g)
- Tous les 20-30 minutes
Pour 90 g/h :
- 2 gels (50-60g) + 1 boisson (30-40g), ou
- 3 boissons énergétiques (30g chacune) + 1 gel léger
- Consommation toutes les 15-20 minutes
Pour 120 g/h :
- Combinaison intensifiée de gels ET boissons
- Exige une pratique rigoureuse et une excellente tolérance digestive
Rôle du Mélange Maltodextrine-Fructose
Le ratio maltodextrine:fructose s’avère crucial :
- 2:1 (à 90 g/h) : Compromis efficace, améliore l’oxydation sans surcharger l’intestin
- 1:1 (à 120 g/h) : Permet l’oxydation maximale mais augmente nettement les troubles digestifs
Le fructose, utilisant le transporteur GLUT5 distinct, aide à contourner la saturation de SGLT1. Cependant, même cette stratégie a ses limites digestives.
Autres Facteurs Impactant la Tolérance Digestive
Au-delà de l’apport glucidique, d’autres éléments jouent un rôle crucial :
- État hydratation : Une déshydratation aggrave les troubles gastriques
- Conditions climatiques : La chaleur ralentit la vidange gastrique
- Intensité de l’effort : Le stress diminue la circulation digestive
- Habitudes nutritionnelles : Une alimentation préparatoire riche en fibres peut augmenter les sensibilités
- Sommeil et repos : Un manque de récupération amplifie les troubles digestifs
Conclusion : Équilibre Performance-Confort
L’étude récente confirme que 120 grammes de glucides par heure offrent une meilleure utilisation énergétique et une économie de course pour les marathoniens élite. Cependant, le prix en termes de troubles gastro-intestinaux reste réel et doit être pesé attentivement.
Pour la majorité des coureurs, un apport judicieux de 70 à 90 grammes par heure, appuyé par un entraînement nutritionnel régulier, offre le meilleur retour sur investissement en termes de performance, confort et confiance le jour du marathon.
L’essence du succès marathonien réside moins dans la théorie nutritionnelle parfaite que dans la pratique méthodique et l’adaptation personnalisée. Testez, ajustez, et optimisez selon votre physiologie unique.
Qui est Nicolas ?
Je suis un passionné de course à pied avec plus de 15 ans d'expérience. Ayant débuté comme coureur amateur, j'ai progressivement affiné mes compétences en m'informant sur les meilleures pratiques d'entraînement, que je partage désormais avec mes lecteurs.
Mon objectif est de rendre la course accessible à tous, en proposant des conseils pratiques, des analyses techniques, et des méthodes adaptées à tous les niveaux.
Actuellement en cours de formation pour le CQP Animateur d’athlétisme option « athlé forme santé », préparateur mental et nutritionniste sportif diplômé, j'approfondis mes compétences en entraînement et pédagogie afin de partager des méthodes et des approches efficaces et adaptées aux besoins des coureurs de tous niveaux.
Quelques faits d’armes :
- 100 km de Steenwerck : 7h44
- 80 km Ecotrail Paris (1300m D+) : 7h12
- 42 km Nord Trail Mont de Flandres (1070m D+) : 3h11
- Marathon de Nice-Cannes : 2h40
- Championnats de France de Semi-Marathon : 1h13
- 10 km de Lambersart : 34'16

