L'urolithine A est-elle le prochain complément alimentaire incontournable pour les coureurs ?
13 minutes de lecture

Une molécule produite naturellement par votre intestin à partir de grenades pourrait bien transformer votre récupération, optimiser vos mitochondries et améliorer vos performances en course à pied. Si cela vous semble trop beau pour être vrai, laissez-nous vous expliquer pourquoi l’urolithine A suscite un intérêt croissant dans le monde de l’endurance.

Cette molécule émergente apparaît désormais dans tous les domaines qui intéressent les athlètes d’endurance : l’endurance musculaire, la récupération après l’effort, et surtout les mitochondries, ces véritables centrales énergétiques qui alimentent vos longues sorties.

Qu’est-ce que l’Urolithine A ?

L’urolithine A appartient à la famille des postbiotiques. Contrairement aux probiotiques présents directement dans les aliments, elle est produite lorsque certaines bactéries intestinales décomposent des composés appelés ellagitanins, que l’on trouve principalement dans les grenades, certaines baies et quelques noix.

Le problème ? Tout le monde ne produit pas naturellement de l’urolithine A en quantité suffisante. La composition du microbiome intestinal varie considérablement d’une personne à l’autre, ce qui explique pourquoi les chercheurs testent désormais l’urolithine A purifiée sous forme de supplément. Prendre directement le supplément permet de contourner cette étape de conversion intestinale.

Le Mécanisme d’Action : La Mitophagie

L’urolithine A semble stimuler un processus cellulaire crucial appelé mitophagie. Il s’agit du mécanisme naturel par lequel vos cellules éliminent les mitochondries endommagées ou vieillissantes pour permettre à des mitochondries neuves et plus performantes de prendre leur place.

Pour les coureurs, ce processus est fondamental. Des mitochondries plus efficaces signifient une meilleure production d’ATP (l’énergie cellulaire) pour un effort donné, ce qui se traduit concrètement par une sensation d’effort réduit à une allure identique.

Ce Que Révèlent les Études Chez l’Humain

Les essais cliniques menés jusqu’à présent, principalement chez des adultes d’âge moyen ou plus âgés, ont révélé des résultats encourageants. La supplémentation en urolithine A a été associée à plusieurs bénéfices mesurables :

Endurance et force musculaire améliorées lors de tests standardisés, avec des gains modestes mais significatifs de la capacité aérobie. Les marqueurs sanguins montrent également des changements favorables suggérant un métabolisme des graisses plus efficace et une inflammation systémique réduite.

Ces résultats ne promettent pas un record personnel instantané, mais ils décrivent exactement le type d’améliorations structurelles et progressives qui comptent vraiment sur la durée d’un cycle d’entraînement complet.

Pourquoi l’Urolithine A Pourrait Intéresser les Coureurs d’Endurance ?

Deux raisons principales expliquent l’intérêt potentiel de cette molécule pour les athlètes d’endurance.

1. Optimisation Mitochondriale

La performance en endurance dépend autant de la qualité de vos mitochondries que de leur quantité absolue. Un renouvellement mitochondrial plus efficace pourrait améliorer la production d’ATP à une allure donnée, rendant le même effort objectivement plus facile à soutenir.

2. Récupération Accélérée

Si l’urolithine A atténue réellement les signaux de dommages musculaires et l’inflammation après des séances intenses, vous pourriez récupérer plus rapidement entre les entraînements. Cette capacité à enchaîner plus de séances de qualité représente probablement le levier de performance le plus important dans le monde réel.

Les effets sont vraisemblablement modestes et additifs, mais c’est précisément ainsi que se manifestent souvent les véritables avancées chez les coureurs bien entraînés.

L’Étude de Référence : Coureurs d’Élite en Altitude

Une étude randomisée récente a examiné les effets de l’urolithine A chez des coureurs hautement entraînés (VO₂max moyen d’environ 66 mL/kg/min) lors d’un stage d’entraînement en altitude.

Protocole de l’Étude

Les participants ont été répartis en deux groupes :

  • Groupe urolithine A : 22 coureurs prenant 1000 mg par jour
  • Groupe placebo : 20 coureurs recevant un placebo

La supplémentation a duré quatre semaines pendant un camp d’entraînement supervisé en altitude. Plusieurs paramètres ont été mesurés avant et après le camp : composition corporelle, masse d’hémoglobine, économie de course, performance sur 3000 mètres et VO₂max.

Chaque semaine en altitude, tous les participants ont également effectué une course en descente d’environ 4,5 km pour provoquer des dommages musculaires et évaluer les marqueurs d’inflammation et de récupération.

Un sous-groupe de 20 participants (11 du groupe urolithine A et 9 du groupe placebo) a fourni des échantillons de tissus musculaires pour des analyses approfondies.

Résultats sur la Performance et la Physiologie

Amélioration de la Performance sur 3000m

La performance sur 3000 mètres s’est légèrement améliorée dans les deux groupes, mais l’amélioration était plus marquée avec l’urolithine A :

  • Groupe urolithine A : amélioration d’environ 2,3% (soit ~12 secondes)
  • Groupe placebo : amélioration d’environ 0,6% (soit ~3 secondes)

Un résultat particulièrement intéressant : la perception de l’effort (RPE) après la course post-camp était plus faible dans le groupe urolithine A. Autrement dit, les coureurs ont rapporté un effort ressenti inférieur malgré une vitesse légèrement supérieure.

Augmentation du VO₂max

Le VO₂max a augmenté davantage avec l’urolithine A :

  • Groupe urolithine A : de 66,4 à 70,0 mL/kg/min (augmentation de ~5,4%)
  • Groupe placebo : de 66,4 à 68,7 mL/kg/min (augmentation de ~3,6%)

Ce résultat est d’autant plus significatif que la masse d’hémoglobine a augmenté de manière similaire dans les deux groupes (environ 4 à 5%). Cela suggère que l’urolithine A pourrait affecter la capacité aérobie par des mécanismes indépendants de l’augmentation de la production de globules rouges.

L’économie de course à vitesse fixe n’a pas changé de manière significative, et la composition corporelle (masse maigre et masse grasse) est restée stable dans les deux groupes.

Récupération et Dommages Musculaires

Marqueurs de Dommages Musculaires

Les marqueurs de dommages musculaires, en particulier la créatine kinase (CK), ont diminué au fil des semaines dans les deux groupes en réponse aux courses en descente hebdomadaires. Il s’agit d’une adaptation classique à l’entraînement, sans différence claire entre les groupes.

Cependant, après la course de 3000 mètres, les coureurs prenant de l’urolithine A ont montré une réponse totale de CK nettement plus faible au cours des 24 heures suivantes, alors que ceux du groupe placebo n’ont pas montré cette atténuation. C’est un signal clair de réduction des dommages musculaires induits par l’exercice.

Inflammation Systémique

La protéine C-réactive (CRP), un marqueur d’inflammation systémique, n’a pas beaucoup bougé dans aucun des deux groupes, suggérant que l’effet principal de l’urolithine A se situe davantage au niveau musculaire local qu’au niveau de l’inflammation générale.

Modifications au Niveau Musculaire

Dans le sous-groupe ayant fourni des biopsies musculaires (qui n’a pas participé aux tests de course pour des raisons pratiques), l’urolithine A n’a pas directement augmenté la production mitochondriale, mais a modifié la “boîte à outils interne” du muscle vers un meilleur entretien mitochondrial.

Trois Changements Majeurs Observés

1. Augmentation des Protéines Mitochondriales

L’analyse protéomique (un examen approfondi de milliers de protéines musculaires) a révélé une augmentation coordonnée des protéines qui construisent et entretiennent les mitochondries. Deux groupes de protéines ont particulièrement augmenté :

  • Les protéines ribosomales mitochondriales (qui assemblent les protéines mitochondriales) et d’autres facteurs de traduction/assemblage
  • Les protéines liées à l’expression des gènes mitochondriaux, y compris une enzyme qui transcrit l’ADN mitochondrial

2. Activation de la Mitophagie

Des signes indiquent que la mitophagie (le recyclage des mitochondries usées) a été stimulée. Un meilleur renouvellement signifie généralement des mitochondries plus saines et plus efficaces au fil du temps.

3. Réduction de l’Inflammation

Les voies liées à l’inflammation ont montré une tendance à la baisse. Cela ne signifie pas “pas d’inflammation”, mais suggère que l’urolithine A pourrait être utile pour calmer l’inflammation pendant les blocs d’entraînement intensifs, particulièrement avec le stress supplémentaire de l’altitude.

Capacité Mitochondriale Inchangée à Court Terme

Malgré tous ces changements, les marqueurs classiques de capacité mitochondriale n’ont pas bougé en quatre semaines. Ces marqueurs nécessitent généralement soit plus de temps, soit un stimulus d’entraînement plus important, soit les deux. En d’autres termes, l’urolithine A n’a pas semblé améliorer directement la fonction ou le nombre de mitochondries dans cette étude à court terme.

Applications Pratiques pour les Coureurs

Si vous vous préparez pour un bloc d’entraînement intense (altitude, préparation spécifique à une course, travail important en descente ou sur piste), l’urolithine A à raison de 1000 mg par jour pourrait vous aider à vous sentir mieux et à présenter des marqueurs de dommages musculaires plus faibles après des efforts difficiles. Elle pourrait même légèrement améliorer votre VO₂max.

Ces bénéfices sont particulièrement intéressants s’ils vous permettent d’enchaîner des séances de qualité avec moins de fatigue résiduelle.

Attentes Réalistes

N’attendez pas de l’urolithine A qu’elle réduise magiquement votre temps sur 3 km, 5 km ou marathon à elle seule. L’entraînement et la nutrition restent les piliers fondamentaux de la performance. Mais en tant que complément de soutien à la récupération, c’est une expérience raisonnable pour 4 à 8 semaines.

L’idéal est d’utiliser un produit testé par un tiers indépendant et de le prendre le matin à jeun, comme dans l’étude.

Profils de Coureurs Susceptibles de Bénéficier le Plus

Si vous êtes plus âgé ou moins entraîné que les participants de cette étude, vos chances de remarquer un bénéfice notable sont probablement plus élevées. Si vous êtes déjà proche de votre plafond de performance, attendez-vous à des gains subtils mesurés davantage en termes de disponibilité quotidienne qu’en records massifs à l’entraînement ou en compétition.

Limites et Considérations

Quelques réserves importantes doivent être mentionnées concernant cette étude :

  • L’étude n’a inclus que des hommes, ce qui limite la généralisation aux coureuses
  • La durée était de seulement 4 semaines, insuffisante pour observer certaines adaptations à long terme
  • Les cohortes de performance et de biopsie étaient séparées (une pratique courante dans les études sur athlètes d’élite pour maintenir la faisabilité)
  • La variabilité inhérente à un camp d’entraînement réel (à la fois une force et une limitation) ajoute du bruit aux données

Question de Budget : Le Coût de la Supplémentation

Un avertissement important : l’urolithine A n’est pas bon marché. Les marques de meilleure qualité coûtent environ 115 dollars pour un approvisionnement d’un mois.

L’Alternative Économique : Le Jus de Grenade

Si vous recherchez une option plus abordable, vous pouvez opter pour du jus de grenade ou de l’extrait de grenade et laisser vos bactéries intestinales faire le travail de conversion en urolithine A.

Cette approche présente cependant une limite : comme mentionné précédemment, tout le monde ne possède pas le microbiome intestinal nécessaire pour produire efficacement de l’urolithine A. C’est une loterie génétique et microbienne.

Les aliments naturellement riches en ellagitanins incluent :

  • Grenades (la source la plus concentrée)
  • Framboises
  • Fraises
  • Noix (particulièrement les noix de pécan et les noix communes)
  • Certaines baies moins courantes

L’Urolithine A : Une Pièce du Puzzle Performance

L’urolithine A représente une approche scientifiquement fondée pour optimiser la récupération et potentiellement améliorer certains paramètres de performance en endurance. Elle ne remplacera jamais un entraînement bien structuré, une nutrition adéquate ou un sommeil de qualité, mais elle pourrait constituer un complément intéressant pour les coureurs recherchant tous les avantages possibles.

Pour Qui Cette Supplémentation Est-Elle Pertinente ?

L’urolithine A semble particulièrement adaptée pour :

  • Les coureurs préparant des compétitions importantes et cherchant à maximiser leur récupération
  • Les athlètes d’endurance plus âgés (40 ans et plus) où la qualité mitochondriale décline naturellement
  • Les coureurs enchaînant des blocs d’entraînement intensifs avec peu de temps de récupération
  • Ceux qui s’entraînent en altitude ou dans des conditions particulièrement exigeantes
  • Les coureurs ayant des difficultés persistantes de récupération malgré une nutrition et un sommeil optimisés

Pour Qui Cette Supplémentation Est-Elle Moins Prioritaire ?

L’urolithine A n’est probablement pas une priorité pour :

  • Les débutants qui bénéficieraient davantage d’optimiser d’abord les fondamentaux (entraînement, nutrition, sommeil)
  • Les coureurs avec un budget limité qui feraient mieux d’investir dans des éléments essentiels comme de bonnes chaussures ou un suivi diététique
  • Ceux recherchant des gains de performance immédiats et spectaculaires

Perspectives Futures et Recherches Nécessaires

Bien que prometteuse, l’urolithine A nécessite encore davantage de recherches pour confirmer son potentiel. Les futures études devraient idéalement :

  • Inclure des femmes athlètes pour évaluer d’éventuelles différences de réponse
  • S’étendre sur des périodes plus longues (8 à 12 semaines minimum) pour observer les adaptations complètes
  • Tester différentes doses pour identifier le rapport optimal efficacité/coût
  • Comparer l’efficacité entre différents niveaux d’entraînement (débutants vs élites)
  • Examiner les effets sur des distances variées (5 km vs marathon vs ultra)
  • Analyser la réponse individuelle pour identifier les “bons répondeurs” et les “mauvais répondeurs”

Conclusion : Un Outil Supplémentaire dans Votre Arsenal

L’urolithine A rejoint une liste croissante de suppléments ayant démontré des bénéfices réels, bien que modestes, dans des études scientifiques rigoureuses. Elle ne transformera pas un coureur moyen en champion olympique, mais elle pourrait vous aider à récupérer légèrement plus vite, à vous sentir légèrement mieux lors des blocs d’entraînement intenses, et possiblement à améliorer marginalement certains paramètres physiologiques comme le VO₂max.

Pour les coureurs recherchant tous les avantages possibles et disposant du budget nécessaire, une supplémentation de 4 à 8 semaines autour des périodes clés de la saison (préparation marathon, stages en altitude, phases de volume élevé) semble raisonnable et sécuritaire.

Pour les autres, l’intégration régulière d’aliments riches en ellagitanins comme les grenades dans votre alimentation représente une alternative naturelle et économique, bien que potentiellement moins fiable en termes de production réelle d’urolithine A.

Comme toujours en matière de supplémentation sportive, l’approche la plus sage consiste à considérer l’urolithine A comme un complément potentiel à une base solide d’entraînement intelligent, de nutrition optimale et de récupération adéquate, jamais comme un substitut à ces fondamentaux.

Source: Whitfield J, McKay AKA, Tee N, McCormick R, Morabito A, Karagounis LG, Fouassier AM, D’Amico D, Singh A, Burke LM, Hawley JA. Evaluating the Impact of Urolithin A Supplementation on Running Performance, Recovery, and Mitochondrial Biomarkers in Highly Trained Male Distance Runners. Sports Med. 2025 Aug 21. doi: 10.1007/s40279-025-02292-5. Epub ahead of print. PMID: 40839339.

Nicolas Dayez, Fondateur de Athlé expliqué

Qui est Nicolas ?

Je suis un passionné de course à pied avec plus de 15 ans d'expérience. Ayant débuté comme coureur amateur, j'ai progressivement affiné mes compétences en m'informant sur les meilleures pratiques d'entraînement, que je partage désormais avec mes lecteurs.

Mon objectif est de rendre la course accessible à tous, en proposant des conseils pratiques, des analyses techniques, et des méthodes adaptées à tous les niveaux.

Actuellement en cours de formation pour le CQP Animateur d’athlétisme option « athlé forme santé », préparateur mental et nutritionniste sportif diplômé, j'approfondis mes compétences en entraînement et pédagogie afin de partager des méthodes et des approches efficaces et adaptées aux besoins des coureurs de tous niveaux.

Quelques faits d’armes :
- 100 km de Steenwerck : 7h44
- 80 km Ecotrail Paris (1300m D+) : 7h12
- 42 km Nord Trail Mont de Flandres (1070m D+) : 3h11
- Marathon de Nice-Cannes : 2h40
- Championnats de France de Semi-Marathon : 1h13
- 10 km de Lambersart : 34'16

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